Promouvoir l’accompagnement plutôt que l’avortement
Le 19 janvier 2022, le texte sur l’allongement de l’IVG est de retour au Sénat en 2e lecture.
Mgr Pierre d’Ornellas, responsable du groupe de travail Bioéthique des évêques de France,
appelle à un « accompagnement respectueux des femmes » et au respect des consciences.
La proposition de loi portée par Albane Gaillot, députée, visant à allonger de 12 à 14 semaines le délai légal pour l’avortement, est discutée au Sénat ce 19 janvier. Elle est due à la déficience de notre système de santé. Le problème est donc pris à l’envers ! L’éthique est absente des arguments avancés. Le Collège des gynécologues-obstétriciens et l’Académie de médecine s’opposent à cet allongement.
Selon un sondage IFOP d’octobre 2020, 92% des Français estiment que « l’avortement laisse des traces psychologiques difficiles à vivre pour les femmes », et 73% d’entre eux pensent que « la société devrait davantage aider les femmes à éviter le recours à l’interruption de grossesse ». Éviter l’avortement, plutôt que le banaliser, comment discerner la juste voie ?
La vie humaine est un don précieux et le droit à la vie est le premier de tous les droits. L’État a donc le devoir de protéger la vie en renforçant la capacité d’accompagnement et de soin. La vie humaine surgit de façon fragile. Elle est confiée à la protection maternelle du corps qui la porte jusqu’à la naissance. Elle est ensuite confiée à l’éducation où l’amour a normalement toute sa place. Quand l’amour manque et que cela fait souffrir l’enfant, la protection est cherchée ailleurs par la diligence de l’État, dans des familles d’accueil, par exemple, ou grâce à des associations.
Or, la vie est confiée à nos soins bien avant qu’elle ne surgisse. Elle est naturellement le fruit de l’union de l’homme et de la femme. Ceux-ci sont appelés à la grande responsabilité de leur liberté dans l’usage de leur faculté de procréer une nouvelle vie humaine. L’éducation affective, relationnelle et sexuelle vise à éveiller à cette belle responsabilité.
Il existe des grossesses aux conséquences douloureuses, parfois parce que cette responsabilité n’est pas au rendez-vous. Comment alors ne pas accompagner les femmes – parfois mineures – qui se sentent souvent seules pour décider de la suite : faut-il avorter ou garder l’enfant ? Cette question n’est pas anodine pour une mère, tellement le lien entre elle et l’enfant est intime et existentiel.
L’accompagnement respectueux des femmes confrontées à ces moments difficiles est précieux pour qu’elles reçoivent des informations exactes et intégrales afin d’être aidées à discerner leur décision la plus juste. Le temps est fondamental pour mûrir un tel choix ! Il évite la précipitation, jamais bonne conseillère. Il est nécessaire pour les autres personnes concernées, notamment le père. Souvent, il conduit au choix de la vie, qui n’entraine pas de blessure psychologique et qui, sur la durée, laisse en paix.
Penser à l’avortement, c’est considérer deux êtres humains : la femme et celui qu’elle porte. Tel voulait être en 1975 l’équilibre de la loi Veil. Sans oublier la vie en gestation, cette loi veillait à la santé des femmes en détresse, et proposait les entretiens. 46 ans après, l’attention n’est portée dans la loi que sur « les droits de la femme ». En 2014, ceux-ci ont remplacé la considération de « la mère ». Entre la loi Gaillot et la loi Veil, aucune continuité, mais un glissement qui aboutit à l’oubli légal de la vie en gestation, ce qu’une femme enceinte ne peut oublier.
Ladite proposition prévoit la suppression de la clause de conscience spécifique à l’avortement. Or, le respect de la conscience est en soi essentiel, mais ici de façon spécifique pour les soignants puisqu’en écoutant avec respect la femme, ils sont directement confrontés au respect de la vie.
De plus, banaliser l’avortement en en faisant un acte ordinaire pour les sages-femmes est vraiment opposé à leur mission : faire mettre au monde la vie humaine. Comment s’étonner alors du manque de sages-femmes ?
Pour le croyant en Dieu, le respect de la vie est une lumineuse évidence. De même, le respect envers la femme qui est aux prises avec le désir d’avorter, et qui a besoin, non d’être jugée, mais d’être accompagnée avec délicatesse. Aimer dans l’accompagnement de ces situations, comme Dieu le demande, ne se fait pas sans souffrances ni sans attentions au chemin de chacune et de chacun.
Rennes, le 18 janvier 2022
+ Pierre d’Ornellas
Archevêque de Rennes