Octobre 2019 – Édito de Mgr Yves Le Saux

 

Le débat parlementaire sur le projet de loi bioéthique est ouvert. L’Église comme d’autres associations, a été auditionnée. Mais comme le dit Monseigneur Aupetit, archevêque de Paris : « Nous avons le sentiment de ne pas avoir été entendu. Les questions que nous avons posées, n’ont pas reçu de réponses. », en particulier sur le fait que le lien corporel et charnel fonde la filiation, la disparition du père, la situation de l’embryon humain qui devient un matériau disponible à la recherche.

L’Église est préoccupée et aussi nombre de citoyens : qu’est-ce que cela engage pour l’avenir ? Il ne s’agit pas d’abord d’un débat d’opinion ou de savoir si l’opinion publique dans sa majorité est aujourd’hui disposée à ces évolutions, mais de s’interroger sur la vérité et la justesse de ces évolutions, s’interroger sur ce qu’est la personne humaine, sur ce qui fonde la dignité de la personne et sur quel type de relation, nous voulons construire à l’avenir.

Beaucoup s’interrogent et n’ont comme seul moyen pour s’exprimer que la manifestation publique. Il est normal qu’ils puissent s’exprimer. Je reprends encore les propos de l’archevêque de Paris : « La démarche qui consiste à manifester est non seulement licite mais utile. » A chacun, il revient bien sûr de juger ce qu’il pense judicieux de faire ou de ne pas faire.

La question de fond est celle de l’anthropologie : qu’est-ce que la personne humaine ? Aujourd’hui, l’anthropologie est interrogée par les nouvelles technologies, la bioéthique, le transhumanisme. Cela nous oblige à définir ce qui fonde la dignité de la personne. Le progrès technique est une excellente chose mais si, au progrès technique ne correspond pas un projet dans la formation éthique de l’homme alors ce n’est plus un progrès humain mais une menace pour l’homme. Cela sera l’objet de la prochaine journée Essentiel’Mans : « Qui est mon frère ? ». Je ne peux que vous encourager à participer à cette journée.

Parler du respect de la personne et de sa dignité concerne d’autres domaines. Je pense à la journée mondiale des migrants qui a eu lieu dimanche dernier, 29 septembre. La situation des migrants est une question complexe à traiter. Mais nos frères qui viennent d’ailleurs, victimes du monde économique, exclus et parfois persécutés , qui n’ont pas d’autres issues que fuir leur pays, sont d’abord des personnes et  non des cas ou un problème à traiter. Jésus, fils de Dieu, venant en ce monde, s’est identifié au plus pauvre, à celui qui est étranger, à celui qui a faim.

On parle aujourd’hui d’écologie intégrale : qu’est-ce que cela signifie ? De quoi parle-t-on ? Il ne s’agit pas seulement de la sauvegarde  de la nature et de la biodiversité, ni seulement de trier nos déchets ou de manger de manière plus saine, mais de la place de l’homme dans la création, de la relation les uns aux autres.

« La crise écologique est l’éclosion ou la manifestation extérieure de la crise éthique, culturelle et spirituelle de la modernité. Nous ne pouvons pas prétendre soigner notre relation à la nature, à l’environnement sans assainir toutes les relations fondamentales de l’être humain. » Laudato Si, n°119. Tout est lié. On ne peut pas s’inquiéter de la souffrance animale et ne pas s’interroger sur le massacre de milliers d’êtres humains. On ne peut pas s’interroger sur le bien fondé du maïs transgénique et ne pas le faire quand on manipule le genre humain.

Le défi est colossal mais nous croyons et nous savons que la présence de la croix du Christ et sa résurrection sont toujours plus grandes que tout le mal dont l’homme pourrait et devrait avoir peur.

 

✠ Yves Le Saux
Evêque du Mans