Les origines de notre diocèse
La présence chrétienne dans notre région du Maine remonte très probablement au tout début du IVème siècle. Les grands sanctuaires païens, comme ceux de Mars-Mullo à Allonnes (tout près du Mans), déclinent et disparaissent vers les années 350 sous l’influence du christianisme, comme l’attestent les dernières pièces de monnaie retrouvées sur ces lieux.
Comme premiers évangélisateurs, ce sont les noms de Julien, Thuribe et Pavace que la tradition orale nous a transmise. Dans notre ville voisine de Tours, Gatien fait figure de premier évangélisateur. Ces noms attachés aux sources du christianisme seront vite surpassés par ceux des premiers évêques d’une Eglise qui s’implante au grand jour : Saint-Martin à Tours et Saint-Liboire au Mans à la fin du IVè siècle.
De manière certaine, le testament – toujours conservé dans sa totalité – de Saint-Bertrand, évêque du Mans, permet d’attester qu’en 616 existait déjà une petite basilique funéraire sur les bords de la Sarthe dédiée à « Saint-Julien, premier évêque du Mans ». Les murs de cette basilique furent retrouvés au XIXème siècle lors de fouilles exécutées par l’Abbé Julien Livet sous l’actuel église Notre Dame du Pré. On peut encore voir dans la crypte de cette église les fondations de ses murs, datables de la fin du IVème siècle.
Sur cet emplacement du tombeau de notre premier évangélisateur fut construit un monastère où les moniales avaient la charge de vénérer l’heureuse mémoire de Saint-Julien. Sainte-Adna, tout d’abord religieuse bénédictine à Soissons, en devint l’abbesse au VIème siècle.
La figure de Saint-Julien
De Saint-Julien, nous ne connaissons que peu de choses en dehors de l’époque de sa venue en notre région. D’où était-il originaire ? D’un pays du bassin méditerranée de toute évidence, mais lequel ? La Turquie ? L’Egypte ? Ou encore la Syrie, comme Saint Martial, un autre évangélisateur de la même époque ou son homonyme en langue arabe Mar Elian ?
Le reste est véhiculé par la tradition orale qui lui attribue de nombreux miracles en notre région dont celui de cette fontaine qu’il fait jaillir d’un rocher auprès de nos murailles antiques et qui est la base de notre actuel logo diocésain.
Cette même tradition orale nous apprend que Julien serait vite devenu ami avec le Defensor, c’est-à-dire le gouverneur romain de la ville du Mans, et qu’il aurait baptisé toute sa famille avant d’évangéliser l’ensemble du Maine et de détruire les temples païens. Alors que Saint-Julien, après de longues années d’apostolat, décide de quitter la ville et de se retirer dans un endroit paisible pour mourir, le Defensor vient le saluer une dernière fois et lui demande de lui envoyer un signe lorsqu’il sera mort. Julien lui annonce qu’il le verra alors apparaître en songe, entouré de trois diacres portant chacun un chandelier. C’est ce ‘songe du Defensor’ qui permettra de composer le multiséculaire blason de la ville du Mans flanqué de ces chandeliers.
Le lieu de la mort de Julien transmis par la tradition orale se situerait dans le village de Saint-Marceau, à quelques kilomètres au nord du Mans. Vous pouvez y visiter une chapelle ornée de beaux vitraux.
Son corps fut ramené dans le cimetière des bords de la Sarthe avant qu’une petite basilique funéraire soit bâtie et dont les vestiges sont encore visibles sous l’actuelle église Notre Dame du Pré. Son corps y restera jusqu’au IXème siècle avant d’être transféré à l’intérieur des murailles de la ville, à la cathédrale, dans le but d’être protégé des invasions normandes.
Aujourd’hui, deux villages du sud de l’Italie et de la Sicile sont sous la protection de Saint-Julien du Mans. Il est fêté le 27 janvier.
Saint Liboire fonde les premières paroisses
A la même période que Saint-Martin de Tours, Liboire est évêque du Mans. A ce moment, le rôle de l’évêque devient officiel dans un empire romain qui se christianise à une vitesse impressionnante. Aucun texte digne de confiance historique ne relate les détails de l’épiscopat de Liboire, mais nous savons qu’à cette époque les évêques sont chargés de construire trois lieux principaux dans leur ville : un lieu de culte, un lieu d’enseignement et un lieu de la charité pour le service des malades et des pauvres. On est quasiment certain que ces lieux sont implantés à l’intérieur des murailles de la ville, là où s’élève actuellement notre cathédrale. On pense même que l’actuel évêché se situe sur l’emplacement du premier lieu de la charité du fait que des plans cadastraux désignent depuis plus d’un millénaire cet espace sous le nom de « grabatori », nom qui désignait à l’époque les catéchumènes malades qui se préparaient en urgence à recevoir le baptême.
Une légende tardive – mais probable – veut que Saint-Martin vienne assister son ami Liboire à l’heure de sa mort. Arrivant de Tours, dans les vignes proches de l’Huisne, Martin aperçoit Victeur qui travaille aux champs et le désigne comme successeur de Liboire au siège épiscopal du Mans. Ceci se serait passé à une lieue du centre de la ville d’où l’actuelle nom de l’église Saint-Martin de Pont-Lieue.
Le corps de Saint-Liboire fut déposé dans une église dédiée aux Saints Apôtres sur les bords de la Sarthe comme l’atteste le testament de Saint-Bertrand en 616, avant que son corps ne soit transféré jusqu’au diocèse de Paderborn. Les vestiges de cette église des Saints Apôtres furent retrouvés au XIXème siècle lors de la fortification des quais de la Sarthe, quasiment à l’emplacement de l’actuel « Hôtel Ibis », quai Ledru-Rollin.
Saint-Liboire est invoqué pour les maladies touchant les reins. Il est particulièrement vénéré au diocèse de Paderborn en Allemagne. Une grande église porte son nom dans la banlieue de Rome depuis 1996 et fut le titre cardinalice du Cardinal Degenhardt avant d’être transmis au Cardinal Turckson, actuel préfet du grand dicastère pour le développement intégral.
Saint-Liboire est fêté le 23 juillet.
L’Eglise du Mans à l’époque mérovingienne
Faisant suite à l’évêque Badegesil qui a ruiné l’Eglise du Mans, Bertrand prend possession du siège épiscopal en 586. Sa grande fortune (on estime la superficie de ses propriétés à 300 000 hectares) lui permet de bâtir de nombreux lieux de culte sur la ville du Mans et le diocèse, dont la cathédrale dédiée à Sainte-Marie. On retiendra principalement la basilique Saint-Pierre et Saint-Paul qu’il chérissait entre toutes et où il fut inhumé en 623 : c’est l’actuelle église de Notre Dame de La Couture. On peut encore voir des éléments de la première construction de l’édifice : entre autres un Christ bénissant dans un linteau d’une porte proche de l’entrée principale, ainsi que des colonnes de l’époque romaine réutilisées dans la crypte contenant son sarcophage. Le testament de Saint-Bertrand, daté de l’an 616, est un trésor pour découvrir la ville du Mans à l’époque mérovingienne. Des sondages archéologiques réalisés sur le terrain de la Maison Saint-Julien ont encore confirmé la description détaillée de ce testament.
Un fragment moyenâgeux du « Suaire de Saint-Bertand » est actuellement conservé au Carré Plantagenêt de la ville. Actuellement, en 2019, on redécouvre l’emplacement de son évêché du VIème siècle sous et près de l’escalier du jet d’eau de la cathédrale.
L’actuelle église de Saint-Pavin des Champs au Mans abrite le sarcophage d’origine de Saint-Pavin retrouvé à l’occasion de la reconstruction de cette église en 1902. On peut toujours le vénérer dans la crypte. Pavin était un moine missionné par l’évêque du Mans, (Domnole + en 581), afin de fonder un hospice pour les pauvres et une école pour les clercs et les notables de toute la province. Il chercha toujours à vivre saintement une vie d’ermite malgré sa mission et meurt le 15 novembre 580.
Saint-Aldric et le plus vieux « jumelage » du monde
Au IXème siècle, les évêques cherchent une forme de primauté sur les autres évêchés en faisant remonter l’édification de leur évêché au plus près des temps apostoliques. L’évêque du Mans tente de s’affirmer par rapport à son homologue de Tours dont la figure de l’illustre Saint-Martin ne cesse de drainer de nombreux pèlerins, et donc de précieux subsides … C’est Aldric, proche du roi Louis le Pieux et originaire de la Saxe, qui s’acquittera de cette tâche une fois nommé évêque du Mans en 832. Dans un recueil « d’Actes du diocèse », il transformera la tradition orale narrant les débuts de l’Eglise dans le Maine en récits argumentés et augmentés de ses propres désirs, n’hésitant pas à faire remonter la mission de Saint-Julien à l’époque du Pape Clément (1er siècle) ! En 836, le fait d’offrir le corps de Saint-Liboire à son ami Badurad, évêque de Paderborn, n’est peut être pas étranger à cette tentative de reconquête. Lors de la translation des reliques, les manceaux sont furieux contre leur évêque qui leur subtilise leur saint protecteur, vénéré depuis toujours. C’est à ce moment que le culte envers Saint-Julien, premier évêque du Mans, va se déployer dans le cœur des sarthois pour les consoler de cette perte.
Lors de la translation des reliques de Saint-Liboire, on raconte qu’un paon précédait le cortège et qu’il mourut de fatigue en arrivant à Paderborn. Depuis ce jour, le paon est le symbole du « pacte d’éternelle fraternité » conclu par Aldric et Badurad et dont la promesse est toujours très vivante aujourd’hui. Markus, le paon de notre Maison diocésaine serait, nous assure-t-on, le digne descendant de ce premier paon carolingien …